J'étais au Tibet
L'an dernier, à cette période ou presque, j'étais à Lhasa où je suis restée dix jours. J'ai visité tous les grands monastères du bouddhisme tibétain. Je mesure aujourd'hui comme il est difficile de parler du Tibet mais j'ai pourtant envie de le faire.
Le Tibet est sous contrôle chinois depuis le XVIIème siècle. Des tentatives d'annexion ont été entreprises à l'époque moderne, par les Britanniques d'abord puis par les Russes.
Les Chinois l'ont repris en main en 1950 en commettant les exactions que l'on sait. Pendant la Révolution culturelle plus particulièrement, la religion boudhiste a été violemment réprimée comme toutes les religions et dans toute la Chine.
Les monastères ont été rouverts, restaurés mais sous contrôle.
Les événements récents me posent question mais surtout par rapport à l'avenir.L'agitation de la diaspora tibétaine ne me semble pas refléter tout à fait la réalité du Tibet actuel où la situation est très complexe.
Tout d'abord les jeunes tibétains qui n'ont pas connu les pires moments des violences chinoises mais ont goûté à la modernité et j'en ai rencontrés, tout en souhaitant garder leur culture ne désirent pas pour autant revenir en arrière.
Ainsi cette jeune femme dont nous parrainons le fils et qui parle français.
En 1950, et là a été la faiblesse du Tibet, le pays était une société féodale et théocratique. Les parents de cette jeune femme étaient esclaves et n'avaient même pas de nom. Les supérieurs des grands monastères et les familles nobles dominaient une population illettrée, et qui l'est encore largement. Ce sont ces nobles qui ont suivi le Dalaï Lama
en exil. Voilà pourquoi à mon avis on ne peut rien attendre de la diaspora.
En revanche, une solution pour le Tibet passe par le retour du Dalaï Lama à Lhasa.C'est certain. A condition toutefois qu'il revienne en tant que chef religieux, c'est finalement ce qu'attendent les Tibétains restés au pays. Non comme chef politique... sinon on revient à une théocratie, régime difficilement défendable. Des négociations étaient bien avancées avec les Chinois et seul l'avenir pourra nous dire si les manifestations de ces derniers jours vont les accélérer ou les retarder.
L'enjeu du Tibet est l'enseignement et l'éducation pour faire émerger une société qui respecte la culture tibétaine en l'inscrivant dans la modernité. C'est le souhait de cette jeune femme qui a eu la chance de pouvoir étudier le Français.
Un dernier mot sur les moines.
Je ne pense pas non plus que leur accession à la tête du pays soit une solution à espérer, pas plus que celle de tous les religieux dans quelque pays que ce soit. Je n'ai pas éprouvé à leur égard une sympathie démesurée. Point de vue personnel.
Sur cette photo ils se livrent à une forme de débat théologique un peu curieux. Je n'ai à aucun moment ressenti en parcourant ces monastères, la présence de spiritualité mais par contre l'omniprésence de l'argent. On marche sur les coupures de monnaie déposées par les pèlerins, il y en a partout. Contrairement aux religieux de nos monastères qui partagent leur temps entre le travail et la prière, les moines tibétains vivent exclusivement d'aumônes et des offrandes de leurs fidèles.
Et vivent plutôt bien.
C'est d'ailleurs il faut le dire la principale raison de l'entrée au monastère comme ça l'était chez nous au XIXème siècle.
Enfin je ne suis pas sûre que le slogan Tibet libre soit la voie à suivre si l'on entend par là une séparation totale. Plus de liberté dans une région qui fait déjà parti des régions autonomes chinoises, c'est certain.
Plus de liberté d'expression, c'est évident comme pour toute la Chine.
Mais je doute qu'une autonomie complète soit économiquement viable.